Vendredi 14 juin 2019. Direction le Botanique qui accueille Lindsey Jordan, aka Snail Mail, pour un concert sold out. La jeune prodige de l’indie rock a invité sa consoeur Sarah Beth, officiant quant à elle dans la folk sous le nom de Tomberlin, à en assurer la première partie.
On pénètre dans la Rotonde un peu après 20h, alors que Tomberlin est sur scène depuis une dizaine de minutes. Quelques notes de guitare acoustique et de piano forment l’écrin de la voix angélique de Sarah Beth. Élevée dans la pure tradition baptiste, cette fille de pasteur aujourd’hui basée dans le Kentucky a fait de sa crise de foi un thème de prédilection. Bien qu’elle ne se considère plus comme chrétienne, ses compositions sont toujours imprégnées d’une certaine spiritualité. Son premier album, At Weddings, est paru l’année dernière. Un disque qu’elle a composé alors qu’elle avait 20 ans et qui lui a en quelques sortes permis de surmonter la solitude, l’isolement qu’elle a vécu dans sa jeunesse. Une belle découverte !
Déjà bien remplie en début de soirée, la salle est maintenant pleine à craquer. La foule compacte attend sagement l’arrivée de celle qu’elle est venue applaudir ce soir : Snail Mail. Cette jeune américaine de vingt ans n’en avait que cinq lorsqu’elle a commencé à jouer de la guitare et seize à l’époque de la sortie de son premier EP : Habit. Autant dire qu’elle a fait le tour du monde avant d’avoir quitté l’adolescence. Aujourd’hui signée chez Matador avec son album Lush, adoubé par la critique, elle est considérée comme la nouvelle prodige de l’indie rock. À travers sa musique, elle pose un regard naïf et romantique sur la vie et sur les angoisses sentimentales et existentielles auxquelles elle a dû faire face lorsqu’elle était adolescente. Mélange de sincérité émotionnelle et de vulnérabilité, ses compositions sont portées par des accords de guitare plaintifs et agréablement aigres embrassés par de la réverbe, le tout agrémenté de sa voix à la fois rauque et juvénile.
Le visage rond, sa guitare en bandoulière, vêtue d’une robe chemise et équipée d’oreillettes qui lui donneront du fil à retorde, Lindsey Jordan prend place sur scène, entourée par ses musiciens de tournée. Naturelle, la bouille revêche, elle entame son set d’une manière un peu abrupte, avec cette précipitation qui caractérise les ados fonceurs. On retrouve ce timbre si particulier qui nous a fait craquer mais on a la sensation qu’elle a du mal à doser la puissance et à maîtriser les inflections de sa voix. Un début de concert assez perturbant par rapport à son album ultra produit. Nous qui la trouvions un peu trop lisse détectons, ce soir, chez elle un côté punk. Heat Wave, Golden Dream, Speaking Terms, Pristine, les titres s’enchaînent avec pour seules transitions quelques réglages de pédales et sessions d’accordage.
Après avoir enfin échangé quelques mots avec le public sur le ton de la plaisanterie, elle annonce son intention de terminer le set seule à la guitare, avec deux nouveaux morceaux qu’elle avoue elle-même ne pas avoir encore beaucoup joués. Elle recommencera d’ailleurs l’intro du deuxième après un « oups », suivi d’un rire enfantin. Mais qui pourrait lui en vouloir avec une bouille pareille ? Une belle conclusion qui prouve que la petite brune n’a pas peur de prendre des risques et mérite l’étiquette de prodige que la plupart des médias lui collent.