Il y a 5 ans, Vincent (Satan) Faidherbe créait son propre label : Cheap Satanism Records. Plus qu’une simple maison de disque, le projet englobe diverses activités de l’organisation de concerts et de soirées à la conception d’expositions. Petit tour du propriétaire en compagnie de son fondateur.
Bonjour Vincent, il y a 5 ans tu as lancé Cheap Satanism Records. Peux-tu nous expliquer ton cheminement? Qu’est-ce qui t’a motivé à créer ton label?
Adolescent, j’étais un grand fan du dessin animé Minus et Cortex dont chaque épisode débutait par le dialogue : « Dis, Cortex, tu veux faire quoi cette nuit? La même chose que chaque nuit, Minus. Tenter de conquérir le monde! ». Ce dialogue est resté gravé dans ma mémoire. Depuis, j’aime justifier ce que je fais en affirmant que c’est un plan pour conquérir le monde. Plus sérieusement, un groupe que j’aimais beaucoup (Keiki) n’arrivait pas à trouver un label pour sortir son deuxième album (Waltham Holy Cross) que je trouvais excellent. Paradoxalement, le premier album du groupe (10 Pieces) m’avait laissé plutôt de marbre. Bref, j’avais de l’argent à perdre et j’ai lancé Cheap Satanism Records pour sortir ce deuxième opus.
Les groupes viennent-ils aussi à toi? Si oui, as-tu des exigences en ce qui concerne leur sélection? Comment les choisis-tu?
Il faut que j’aie un coup de cœur pour l’album que le groupe souhaite sortir chez moi. A l’origine, il fallait également qu’il ait un vague lien avec le satanisme. Rien de très sérieux. Cela pouvait être son genre musical, un titre de morceau, une durée spécifique ou une note d’intention. Mais bon, j’ai arrêté ça parce que ça devenait vraiment tordu. Il faut aussi que je sente que le groupe est capable de tourner. S’il ne tourne pas, je ne vendrai quasi rien, mes principales ressources provenant des concerts. C’est quelque chose que j’avais complètement sous-estimé au début. Concernant l’origine des groupes, j’ai approché la majorité d’entre eux suite à un concert, une découverte SoundCloud, … D’autres sont venus vers moi spontanément. L’année dernière, j’ai même reçu des sollicitations de groupes que j’appréciais déjà à la base. C’est vraiment très gratifiant.
Sur cinq années, tu as réalisé beaucoup de sorties, as-tu eu des coups de cœur? Et quelles sont les prochaines sorties prévues pour Cheap Satanism Records?
Il y a 22 sorties au compteur. C’est beaucoup trop. J’ai été déraisonnable. Cela fait deux ans que je fais pas mal de coproductions où plusieurs labels s’unissent pour une sortie. Cela permet de minimiser l’investissement et le risque. Comme je l’ai dit précédemment, toutes mes sorties sont des coups de cœur, mais si je devais en isoler quelques-unes, je dirais Vitas Guerulaitis, le deuxième Joy As A Toy (Dead As A Dodo), Bee and Flower, (r) et Agatha. Vitas Guerulaïtis, car c’est la première sortie que j’ai faite d’un groupe qui était venu vers moi. Je ne connaissais pas du tout. J’ai reçu son premier album et j’ai directement voulu le faire. Cerise sur le gâteau, sur le plan humain, ils sont devenus de vrais amis depuis. Le deuxième Joy As A Toy, car l’idée derrière cet album vient de moi. Pour la première ZomBIFFF Night (que j’organise dans le cadre du Festival du Film Fantastique de Bruxelles), j’avais demandé au groupe de faire un set de reprises de Golbin. Ils sont revenus avec des morceaux librement inspirés par cette thématique. C’est ainsi qu’est né Dead As A Dodo. Bee and Flower, (r) et Agatha, car j’aimais déjà ces artistes avant qu’ils deviennent des artistes Cheap Satanism Records. Au niveau prochaines sorties, je peux déjà annoncer qu’il y aura le deuxième album de Vitas Guerulaïtis et le prochain album d’Alos, le projet solo de Stefania Pedretti (la chanteuse/guitariste du duo italien OvO). Celui-là, c’est à nouveau un plaisir pour moi car j’ai toujours adoré ce qu’elle faisait aussi bien en solo qu’avec OvO.
Cheap Satanism Records, ce n’est pas uniquement un label. Tu organises pas mal de concerts aussi. Quelles sont les difficultés actuelles dans le secteur?
Personnellement, je n’ai pas trop à me plaindre. Depuis deux ans et demi, je peux me reposer sur un partenariat avec le Café Central qui me permet d’organiser des soirées entrées libres dans de très bonnes conditions et avec une liberté artistique totale. Sans le Café Central, je pense que je ne programmerais quasi plus de concerts. C’est définitivement trop casse-gueule financièrement parlant, le public faisant souvent défaut pour plein de bonnes et mauvaises raisons. Qui plus est, à Bruxelles, il n’y quasi plus de petites salles offrant de bonnes conditions d’accueil pour des organisateurs tiers comme moi. A ma connaissance, il n’y aucun projet en cours qui laisse espérer que cela va changer prochainement. Si seulement, les personnes derrière les lieux existants pouvaient se montrer plus aventureuses ou moins sectaires, on serait déjà avancé.
Propos recueillis par Nancy Junion