Chaque année depuis 2009, le Festival Millenium propose des documentaires arrivés des quatre coins de la planète au coeur de Bruxelles. Avec l’ambition de présenter des films qui vont au-delà du simple constat en proposant un réel regard sur la problématique abordée, ce festival offre une sélection de qualité.
BeCult a eu l’occasion d’assister à trois projections abordant chacune à leur façon la question du web dans nos quotidiens. Si Presenting Princess Shaw nous montre comment cette grande toile permet de créer des rencontres positives et improbables, Down the Deep Dark Web nous entraine dans les abysses du web, tandis que Facebookistan amène un point de vue peu rassurant sur la place de cet énorme réseau social dans nos vies.
« Si Facebook était un État, il serait le plus puissant du monde »
Jakob Gottschau, le réalisateur de Facebookistan enquête sur la politique de confidentialité de Facebook, au contour flou et mouvant, ainsi que sur les frontières poreuses du respect de la vie privée posées par le géant américain.
Le réseau social, devenu quasi incontournable, se présente en effet comme un univers bienveillant dans lequel chacun peut partager les moments importants de sa vie avec ses proches, ou les aimer et les commenter. Mais la vérité n’est pas toujours aussi rose…
« What’s on your mind, Facebook ? »
Si l’objectif présenté et défendu est de rendre le monde plus ouvert et connecté, les limites imposées à la liberté d’expression paraissent tout sauf claires et limpides.
Ce documentaire se construit autour de rencontres avec des individus qui se sont retrouvés en conflit avec le géant bleu pour diverses raisons : l’avocat Max Schrems, militant pour la protection des données ; des drag queens se voyant obligées d’attribuer leur nom officiel à leur compte du jour au lendemain ; un photographe dont le travail sur le mouvement hippie a été censuré pour cause de nudité, etc.
Pour montrer la schizophrénie de cet univers, le montage confronte ces diverses rencontres avec des vidéos de communication officielles de Mark Zuckerberg et de son entreprise. Tous ces portraits croisés donnent vie à ce reportage et offrent une forme de matérialité à ces questions que la plupart des (non)utilisateurs de Facebook se sont posées à l’un où l’autre moment.
Que fait Facebook de mes données ? Pourquoi les garde-t-il ?
Les questions restent sans réponses. Le silence assourdissant de cette société qui refuse de s’adresser aux enquêteurs n’est pas pour rassurer le spectateur dont la vie privée ne semble plus être qu’une marchandise difficilement négociable.
La cohérence du montage permet de faire ressortir les incohérences entre les messages officiels diffusés et les faits. La variétés des témoignages dévoile, quant à elle, l’aspect tentaculaire et pernicieux de ce réseau social auquel il est difficile d’échapper. En somme, on entame le visionnement de ce reportage avec quelques doutes et on en ressort complètement paranoïaque.
En regardant et en partageant ce film – disponible en ligne en cherchant un peu – peut-être pourrait-on faire émerger de nouvelles idées ? Ou tout au moins se poser la question des limites que chacun souhaite fixer et faire respecter.
Jen H.