Coralie, 36 ans, travaille pour une entreprise pharmaceutique, le jour, et est bénévole et membre du comité exécutif de l’asbl Silly Concerts, la nuit. Elle est une de ces petites mains, de ces personnes dont on parle peu mais qui font partie intégrante de la vie de l’asbl.
Quel a été le dernier concert auquel tu as participé en tant que bénévole avant le confinement ?
C’était un concert du groupe Lemon Straw, en février 2020, qui venait présenter son nouvel album dans le cadre de l’Open Club Day… enfin si vous parlez du premier confinement. C’était aussi notre premier concert de la saison, on était super excité·e·s de reprendre du service ! Je me souviens très bien que la date était archi sold out. Des spectateur·rice·s ont eu le privilège de rencontrer le groupe dans sa loge avant le concert, l’ambiance était festive, chaleureuse et bienveillante. Avant le deuxième confinement, on a entre autres pu organiser le festival FrancoSillies, en septembre 2020, dans le cadre de la fête de la Fédération Wallonie-Bruxelles. Les gens étaient heureux de pouvoir entendre à nouveau de la musique live. J’ai ressenti la joie des spectateur·rice·s qui nous ont remercié·e·s à maintes reprises d’avoir pu leur offrir ce moment. Ça nous a coûté beaucoup d’énergie d’organiser nos quatre concerts du mois de septembre en tenant compte des mesures Covid mais qu’est-ce que ça en valait la peine !
Quelles sont les compensations dont tu bénéficies en tant que bénévole ?
Chez nous, les bénévoles ne sont pas rémunéré·e·s. On fait ça par passion uniquement et pendant notre temps libre. Comme l’asbl a un contrat-programme, on reçoit un soutien financier chaque année, mais cet argent est investi dans nos frais d’organisation ou de communication.
Quelles ont été pour toi les conséquence directes de l’arrêt des concerts ? D’un point de vue psychologique, comme financier ?
D’un point de vue psychologique, c’est très très dur parce que les concerts sont une soupape élémentaire et indispensable à mon bien-être. Écouter de la musique live, rencontrer des gens, faire la fête avec les amis dans un endroit chaleureux… ça me manque terriblement. D’un point de vue financier, personnellement je n’ai pas souffert de l’arrêt des concerts étant donné que mon activité de bénévole. Mais il est évident que tout le secteur musical souffre de la crise sanitaire : les salles de concert, les artistes, les technicien·ne·s… c’est une véritable catastrophe !
As-tu l’intention de poursuivre cette activité bénévole lors de la reprise des concerts ?
Je n’ai jamais arrêté mon activité de bénévole. Étant responsable com’, j’entretiens le contact avec notre communauté via les réseaux sociaux, la newsletter, le site web, etc. C’est important pour nous de continuer à faire vivre Silly Concerts ! On a également développé un peu de merchandising (badges, masques, t-shirts, etc.), on a modernisé notre logo, on enregistre des podcasts… Avec les autres bénévoles, on est en contact presque tous les jours. On se tient informé·e·s des dernières sorties musicales en Fédération Wallonie-Bruxelles (et pas que), on continue à penser à notre future programmation, on organise les reports des dates de 2020, on parle de l’aspect financier, etc. On a aussi régulièrement des réunions avec les représentant·e·s des autres salles, via Court-Circuit (on fait partie du réseau Club Plasma).
Quel avenir pour la musique live ? Comment se passeront, selon toi, les concerts du « futur » ?
Je pense qu’il y aura clairement une phase de transition avant un retour à la normale. C’est utopique de croire qu’on va pouvoir du jour au lendemain accueillir 300 personnes comme avant. Les concerts qui se sont déroulés entre les deux confinements ont prouvé qu’il est tout à fait possible d’organiser des concerts en toute sécurité. Certes, en petit comité, assis·e·s et masqué·e·s, mais c’est possible ! Tout le monde doit y mettre du sien, les agents, les organisateurs, les prestataires… Personnellement, je ne crois pas aux livestreams. En tout cas, ce n’est pas dans notre ADN. Rien ne remplace le son du live, les odeurs, les couleurs, l’impression de ne faire qu’un groupe avec le groupe. En plus, je ne m’imagine pas faire payer un droit d’entrée aux spectateur·rice·s pour un concert en ligne. On n’est pas équipé·e·s pour ça et ce n’est pas notre délire.
En cette période morose, quel morceau te remonte le moral ?
The Hives – Come on ! Tout est dit !
Quel a été le meilleur concert auquel tu as assisté en tant que bénévole ?
Arf, c’est difficile de faire un choix. Chaque concert est unique, l’ambiance n’est jamais pareille. Mais si je devais élire le meilleur depuis mes débuts à Silly Concerts, ce serait les SONS ! Ils ont une hygiène irréprochable avant le concert (thé, fruits, etc.) et j’ai compris pourquoi pendant leur live ! Ils ont tout donné, ils avaient une énergie de dingue et ils l’ont transmise au public. En résumé : bière, sueur, rock n’roll… et une belle corbeille de fruits !
L’artiste qui t’a particulièrement marquée ? Et pourquoi ?
En dehors de Silly Concerts je vais (enfin j’allais) régulièrement voir des concerts, presque chaque semaine. J’ai eu la chance de participer au showcase privé d’Arno en septembre 2019 à Mons, c’était la première fois que je le voyais en live et j’ai été complètement touchée par l’artiste. Il présentait son nouvel album et j’ai pu découvrir des textes drôles, subtiles, touchants. C’est un interprète un peu brut, mais on peut facilement percevoir la sensibilité du type. Chaque morceau avait droit à sa petite histoire, à sa genèse. J’aime aussi l’idée qu’un artiste belge néerlandophone chante en français. Ce soir-là, il a rassemblé tout le monde. On était en communion devant le grand Arno !
Une anecdote liée à un concert ?
Le 5 octobre 2019, RENDEZ-VOUS, le fer de lance de la scène post punk parisienne, se produit dans la grande salle qui est pleine à craquer. L’ambiance est à son paroxysme, les spectateur·rice·s sont chaud·e·s, réceptif·ve·s, le genre de soirée où tu sens que ça va être mémorable. Le concert se termine et comme à l’accoutumée, tout le monde se dirige vers le bar pour continuer la soirée jusqu’aux petites heures. Sauf que les derniers qu’on a dû « mettre dehors », ce jour-là, ce n’était pas le public, mais les membres du groupe ! Après leur concert, ils sont venus au bar, ont joué plusieurs parties de baby-foot avec des habitué·e·s du Salon, ont lancé une centaine de fléchettes sur la cible tout en affonnant Silly Bio sur Silly Bio. Ils ne voulaient plus décoller ! C’était un super souvenir ! C’est ça aussi, la magie de Silly Concerts. La proximité des artistes et du public, le mélange des genres, le côté chaleureux, le sentiment d’être « comme à la maison ».