Jan Van Woensel, conservateur en art contemporain, a décidé d’étendre ses activités culturelles à l’organisation des BAD MOØN festivals. Passer de l’art contemporain à la musique semblait être une trajectoire logique. Rencontre…
Bonjour Jan, qui es-tu et que fais-tu?
Je suis l’organisateur des BAD MOØN festivals, une série d’événements musicaux nomades et undergrounds. J’ai longtemps travaillé en tant que conservateur d’art contemporain pour des universités, musées, galeries et des ONG à New York et Los Angeles, où j’ai également longtemps habité. Mais peu à peu l’art qui me fascinait ne me suffisait plus. J’ai fait la connaissance de Lee Ranaldo (Sonic Youth) à New York et de Zach de la Rocha (Rage Against The Machine) à Los Angeles et j’ai commencé à collaborer avec eux. J’avais alors surtout l’envie de secouer et de réveiller le monde artistique, qui est encore super conservateur et qui ne prend aucun risque, à coups de noise et de guitares discordantes. Petit à petit, j’ai laissé les expositions d’œuvres sur le côté et j’ai commencé à me concentrer sur l’organisation de concerts et de performances musicales. J’ai organisé un festival en plein air pour un magazine dans le Lower Easy Side en 2009 et j’ai programmé des groupes comme Glass Ghost, Sufjan Stevens et Adolf Butler à New York et à Amsterdam. J’ai aussi expérimenté le noise, le drone et le doomfolk dans quelques groupes. Depuis cette année, je me distingue en tant que programmateur et organisateur des BAD MOØN festivals.
Peux-tu nous en dire plus sur les soirées Bad MOØN festivals?
Les BAD MOØN festivals sont le prolongement d’une série d’expositions que j’ai réalisées : les BAD MOØN RISING. Ces expos parlaient de transgression, de destruction, de haine, de perte et d’apocalypse. J’en ai organisées à San Francisco, New York, Saint-Louis, Bruxelles, Amsterdam et Londres. J’ai ensuite enterré ce projet car il devenait de plus en plus hype, alors que je suivais une trajectoire tout à fait opposée à un mouvement de mode et que je ne voulais pas de fans. Quelques années après la dernière édition des BAD MOØN RISING, je leur ai donné un souffle nouveau avec les BAD MOØN festivals. Le concept est le même, je programme des groupes qui cherchent des extrêmes. Cela peut être de la shoegaze bien lourde, du black metal, du doom, du drone ou de la noise déconstruite et éclectique, mais aussi de la folk sombre et fragile.
Comment as-tu choisi les groupes qui composent l’affiche de la première édition des Bad MOØN festivals à Anvers?
Je les ai choisis après avoir été à beaucoup de concerts. Anvers dispose de nombreux endroits et organisations undergrounds comme Music City, Het Bos, Kievitsnest (où le festival va se passer), l’ASBL Ondergronds, 9 Volt et beaucoup d’autres jeunes programment de la musique et organisent des petits festivals. A Anvers, il est possible de voir chaque soir de super petits groupes. BRUTUS, Black Swarm et Grimmsons, par exemple, je les ai vus pour la première fois au Rodeo Fest l’été dernier et j’ai été soufflé par leur musique et leur performance. C’est un grand honneur pour moi qu’ils soient placés en haut de l’affiche de cette première édition des BAD MOØN!
Que peux-tu nous dire de plus sur les Bad MOØN RISING?
BAD MOØN RISING était donc une série d’expositions que j’ai faite aux States et en Europe il y a quelques années et que j’ai enterrée depuis. Le titre vient d’un morceau de Creedence Clearwater Revival et de l’album conceptuel des années 80 de Sonic Youth. A côté de Lee Ranaldo et Zack de la Rocha, le peintre Philippe Vandenberg (1952 – 2009) était aussi au centre de ces projets. Vandenberg est, selon moi, l’unique peintre qui ait osé faire de l’art radical en vivant lui-même radicalement et en se sabotant constamment. « Each man kills the thing he loves, some when young, some when old, some with passion, some with gold (…) »* a-t-il écrit dans l’un de ses dessins. Avec ses peintures monumentales « Kill Them All And Dance »**, il a démarché la scène metal et a édité un livre avec Lee Ranaldo. Philippe Vandenberg était à différents niveaux mon inspirateur et mentor pour les BAD MOØN festivals, et j’essaie d’honorer sa vision tragique et radicale de la vie depuis son suicide en 2009.
Propos recueillis par Nancy Junion
La première édition du BAD MOØN festival aura lieu au Kievitnest, à Anvers, le dimanche 30 novembre dès 14h.
*Chaque homme tue les choses qu’il aime, parfois jeune, parfois vieux, parfois avec passion, parfois avec de l’or (…)
**Tuez-les tous et dansez