Le 27 janvier, notre Orangerie nationale se teintait des sonorités métissées et relativement – enfin, complètement – décalées de l’artiste syrien Omar Souleyman. C’est courant 2006 que le chanteur voit sa carrière décoller lorsqu’un Occident avide de nouveautés le découvre pour la première fois sur la compilation Highway to Hassake, sortie sur le label Sublime Frequencies.
Il faut dire qu’en plus de vingt ans de carrière, cet ancien chanteur de mariage a su se construire un style et une identité bien à lui. Son truc ? Moderniser la Dabka traditionnelle à coup de synthés et de boîtes à rythmes. Une mixité absolue donc puisque la Dabka, elle-même, est une musique syrienne qui est faite de musique arabe, de vieux chants chrétiens et même, quoi que plus discrètement, d’influences de la musique juive ou kurde.
Une musique basée sur le folklore qui nous fait, bière à la main et sourire aux lèvres, un peu le même effet que notre Grand Jojo bien à nous. Car l’ambiance grande kermesse exotique est bien là ! La foule est ivre de joie, peut-être bien aussi d’alcool, et se trémousse aux sons un peu désuets mais diablement efficaces du claviériste.
Parlons-en de ce claviériste, pièce maitresse aux dix doigts agiles. Si de manière générale, les compos ne cassent pas des briques, on ne peut manquer d’admirer ce musicien qui, derrière son Casio ou assimilé, donne corps à toutes les mélodies. C’est un peu comme imaginer de la pop-rai-techno sous acide, jouée en live (hors boîte à rythme évidemment) sur un clavier. Une hyperactivité manuelle bien en opposition avec l’attitude scénique d’Omar Souleyman.
Est-ce un personnage ou une forme de pudeur ou de timidité ? Allez savoir. Le fait est que l’homme aux keffieh et lunettes de soleil face à nous semble inexpressif et dénué de tout ressenti. Il se promène, de gauche à droite de la scène, récitant sa poésie d’amour chantée, déclenchant l’hystérie par une simple levée de bras. Déroutante, son attitude est aux antipodes de la musique qu’il propose et de l’ambiance qu’il instaure. Mais c’est ce qui fait son style, finalement.
Ce qui est beau avec ce genre de soirée feel good, c’est la mixité du public qui, au-delà des origines, est rassemblé autour d’une musique qui parle à chacun. Certains, comme moi notamment, se diront qu’ils auraient dû boire quelques coups de plus avant le début du concert et comprendront mieux l’enthousiasme de ceux qui l’ont découvert à Dour, à une heure du mat’.
Dans tous les cas, un live d’Omar Souleyman, c’est une expérience à vivre au moins une fois dans sa vie. Une expérience de cinquante minutes, en fait parfaitement calculée afin d’éviter l’overdose… mais pas la cuite.