Avec une actualité riche, un concept intéressant et une belle énergie, Thot semble être le phénomène électro-rock belge du moment. A la veille de leur concert au Beursschouwburg à Bruxelles, où ils présenteront de nouvelles chansons, nous avons rencontré Grégoire Fray, le chanteur et créateur du groupe.
Si en 2005, Thot n’est qu’un duo clavier/guitares/chant composé de Cyril et Grégoire, c’est en 2010 qu’il devient vraiment un groupe. Et même plus qu’un groupe, un collectif, construit autour de musiciens Gil Chevigné (batterie, électronique) – qu’on retrouve dans The Waow et Two Kids On Holiday, Hugues Peeters (piano, claviers), Julien Forthomme (basse) ; mais aussi d’une VJ, Arielle Moens – qui s’occupe de l’animation visuelle à travers la projection de vidéos, d’un graphiste, Sébastien Bontemps, ainsi que divers photographes.
Thot n’est pas qu’un groupe musical, il est également visuel, s’entourant de symboles très personnels, qui sont comme autant de pistes à suivre dans une évolution. Si la nature est omniprésente aux débuts de Thot, le thème de la ville se dessine avec le nouveau single : Rhythm.Hope.Answers.
« En fait, c’est mon parcours personnel, confie Grégoire. J’ai vécu 20 ans à la campagne, en France, avant d’arriver à Bruxelles. ça a été un tel choc de me retrouver face à une entité avec une ambiance, des lumières, des gens, des habitudes, … Tout ça, c’était vraiment fort! Et donc j’arrive seulement à pouvoir parler de ce que j’ai ressenti, de ce que je ressens encore, de la manière dont je perçois la ville, tout en ayant ce bagage de la nature qui est derrière. Ce sont deux univers qui se parlent, qui s’entrechoquent à travers moi. La ville était aussi un but à atteindre. Je me souviens que, quand j’étais adolescent, j’avais très envie de bouger dans les grandes villes, de sortir de ma campagne. Tu sens que l’émancipation t’appelle et tu sens tout ce qu’une ville peut t’offrir. Le thème de la disparition, c’est la perte des repères, les deux mondes qui s’entrechoquent. »
Quand on lui demande comment il voit l’évolution de Thot depuis les débuts, Grégoire explique : « Le premier album, je l’ai composé sans me dire qu’il y aurait un groupe autour. L’envie était là mais j’avais du mal à trouver des musiciens avec qui je me sentais vraiment connecté. Pour le deuxième album, le groupe actuel était en pleine formation et chaque musicien a apporté son expérience. Aujourd’hui, le tout sonne plus cohérent. Je sais que j’ai un groupe derrière moi donc quand j’écris des morceaux je me dis : « on peut faire ça parce qu’il y a le groupe ». En même temps, il ne faut pas que je me limite à ce qu’un groupe est capable de faire, il faut aussi que j’aille au fond de mes idées. Il y a, par exemple, des morceaux qui vont sonner très électro mais je n’ai pour le moment encore aucune idée de comment on va les faire sonner en live. C’est là où se situe le challenge! Au final, peut-être que l’évolution du groupe c’est de prendre le contre-pied et de partir dans des trucs plus électroniques… »
Le concert de vendredi au Beurs proposera bien sûr de nouvelles chansons mais également de nouvelles vidéos. « Là, avec Arielle (Moens), on a tout un tas de nouvelles images à projeter. Et Caroline Derselle, qui nous a suivis en tant que photographe sur plusieurs concerts – dont la tournée en Europe de l’Est – sera en binôme sur scène avec Arielle. »
Depuis un certain temps, Thot s’investit dans la création de clips vidéo, notamment pour illustrer l’EP The Fall of the Water Towers qui est sorti il y a quelques mois. Constitué de chutes de l’album précédent, Obscured by the Wind, il se présente comme une parenthèse, faisant la part belle à l’ambiant. On y retrouve, plus que jamais, les symboles qui font une partie du concept du groupe : les chardons, les châteaux d’eau, les éoliennes, mais aussi le carré qui s’impose comme une nouveauté récurrente. « Le symbole du carré était déjà perceptible dans l’album précédent car, si tu fais bien attention au graphisme, il y a beaucoup de calques très rectilignes. J’ai simplement voulu mieux l’exploiter parce que je le trouve très beau et plein de sens mais aussi parce que c’est le symbole de la stabilité. Sans être de confession juive, dans le Talmud il est dit que les villes doivent être construites en forme de carré. Et puis, le carré, ça rappelle la géométrie des maisons et ça a quatre faces comme les quatre saisons, les quatre points cardinaux, … »
Si les précédents albums n’ont pas trouvé de labels, Grégoire n’hésitera pas à prospecter pour le prochain, même si cela reste compliqué. « Le problème c’est que le « direct to fan » est une envie, une nécessité. On fait de la musique avant tout pour partager des choses. Pourquoi Thot n’a jamais eu de label? « Ce n’est pas notre style » qu’on aille démarcher des labels électro, rock ou métal, c’était à chaque fois la réponse qui revenait. Et quand on est face à ce genre de réponse, il faut continuer à avancer, trouver sa structure, d’autres réseaux. Entendons-nous bien, démarcher les labels n’est pas une fin en soi mais il est vrai que j’aimerais m’entourer d’une équipe motivée, qui a envie de porter le truc et qui s’occupe de la promo avec une bonne force de frappe. »
S’il n’y a pas encore de date arrêtée pour le nouvel album, les morceaux sont prêts. La plupart doivent encore être enregistrés et mixés mais certains, notamment Rhythm.Hope.Answers, seront déjà joués en live.
Retrouvez Thot en concert gratuit avec Organic, ce vendredi 1er mars, à 19h30, au Beursschouwburg.
Propos recueillis par Marc Durant