Découverts par hasard dans les rayonnages de la Médiathèque (oups, du PointCulture), dans le courant 2011, les Russian Circles ont déjà foulé le sol belge à plusieurs reprises : ils étaient au Stuk, à Leuven, en 2008 et sont passés depuis par le festival de Dour, le Magasin 4, le Vooruit, le Dunk!festival, l’AB… Hier soir, la consécration sonore avait lieu à l’Orangerie du Botanique et la fessée fut intense !
On arrive à l’heure même si, on vous l’avoue, on n’a pas vraiment envie de voir la première partie de cette tournée européenne : Cloakroom. Pas qu’on les aime pas, mais ce soir, on vient juste pour se régaler du trio américain. Alors, en attendant, on se bat avec la machine à jetons qui ne rend pas la monnaie, on boit un petit verre avec des amis de concert et du Dunk!festival.
Le temps passe assez vite, et bientôt on se glisse dans l’enceinte de l’Orangerie, au cinquième rang, avec le batteur en vue principale. Par ce que oui, voir ce batteur en live, est un délice. Hommes et femmes (en petit nombre ce soir, pour ne pas changer) sont bien d’accord sur ce point. La musique qui passe avant le concert rappelle vaguement une bande son proche de la série Twin Peaks, quand, à 21h09, Mike, Brian et Dave prennent possession des lieux, sous les cris des fans.
Ils débutent en douceur avec Asa, le premier titre de leur dernière plaque, Guidance, suivi du deuxième morceau, Vorel, deux compos qui vont naturellement de paire. L’audience se délecte quand ils entament le très sombre Deficit, sorti sur Memorial. Les interludes entre les morceaux peuvent par moments paraître longs pour certains, mais ils ne font qu’en fait augmenter la pression. Brian, avec sa basse puissante et subtilement saturée, lance des foudres pendant 309 (Empros). Puis arrive notre morceau fétiche de Guidance, intitulé Afrika. Une guitare douce et rêveuse débute ce titre empreint de mélancolie, bientôt rejointe par des percussions d’une extrême finesse, le batteur usant avec habileté de ses trois toms, de ses cymbales et des bords de sa caisse claire. Puis, le déluge arrive, sous les cris du public, avec le hit Harper Lewis (Station). Une entrée de jeu tout en batterie, annonciatrice de ce morceau épique, vite suivie par une basse entêtante et par cette guitare envoûtante, devant un parterre hyper enthousiaste, applaudissant en rythme.
S’ensuit le poétique 1777 (Memorial), avec ces riffs de guitare pas si éloignés que ça de The Cure, et on plane, on plane au-dessus des forêts mélodiques du trio, on ferme les yeux un instant, qui ne dure pas longtemps, car on ne veut pas rater une miette du set. Mota (Guidance) nous emmène par delà les nuages, pour nous faire vibrer jusqu’au bout de la nuit. Mládek (Station) clôture ce splendide concert, avec ses vibrances ténébreuses à souhait. Les trois héros de ce soir quittent la scène humblement, remerciant leur public à leur façon. Ils n’ont pas de micros, ne parlent pas pendant leur concert, ni au sortir de scène, ce qui peut en frustrer certains, mais dans le fond, on n’attend pas de paroles de leur part, leur musique parle pour eux.
Ils reviennent juste le temps d’un final (Youngblood), pour notre plus grand plaisir. La tête pleine d’étoiles, le public sort de l’Orangerie, un large sourire aux lèvres, les yeux pétillants et l’âme en paix. On regrette qu’aucun titre d’Enter n’ait été joué ce soir, mais ce regret est minuscule par rapport à la qualité de ce concert… Et pour la petite histoire, Mike Sullivan adore jouer en Belgique et aux Pays-Bas !
Nancy Junion