Après son premier long métrage, Les Barons, sorti en 2009, suivi par La Marche, en 2013, Nabil Ben Yadir continue sa progression dans le paysage cinématographique belge avec un film atypique empreint d’un réalisme fracassant : Dode Hoek (Angle Mort). À découvrir en salles dès le 25 janvier 2017.
Tourné intégralement en néerlandais, Dode Hoek raconte l’histoire de Jan Verbeeck, un commissaire autoritaire et dur qui applique la tolérance zéro à la tête de la brigade des stupéfiants d’Anvers. Suivi de près par la presse et très apprécié par la population, il annonce publiquement, quelques jours avant les élections, sa démission de la police pour rejoindre le parti (fictif mais très réaliste) d’extrême droite VPV. Mais lors de sa dernière mission dans la brigade anversoise, il est mis sur la piste, par un indic wallon, d’un labo clandestin à Charleroi. Lui et son équipe exécutent alors une descente sur place qui déclenchera une suite d’événements surprenants et incontrôlables. Rattrapé par son passé, cet homme de sang froid devra s’extirper d’une situation cauchemardesque.
Un jeu d’acteurs au top, avec dans le rôle principal du commissaire intransigeant au caractère bien trempé, Peter Van Den Begin, un belge de 52 ans dont la renommée n’est plus à faire. Peut-être l’avez vous déjà vu dans King of the Belgians, sorti en 2016, où il interprétait un roi des belges hors du commun. Soufiane Chilah, qui avait déjà fait ses preuves dans le film Black dont la sortie avait fait couler beaucoup d’encre, s’illustre à nouveau en interprétant Dries, le fervent bras droit de Jan Verbeeck. Un casting 100% belge qui se complète avec David Murgia dont on avait pu admirer la performance dans Les Premiers, les Derniers de Bouli Lanners. Jan Decleir, qu’on ne présente plus, campe quant à lui le président du parti extrémiste. Et finalement, impeccable dans le rôle de Leen, une femme forte et indépendante qui reprendra les rênes de la police après le départ du commissaire Verbeeck : Ruth Becquart.
Tourné intégralement en Belgique, ce film laisse entrevoir des panoramas bien de chez nous, avec les régions d’Anvers, Gand, Geel, Bruxelles et le paysage industriel tristement célèbre de Charleroi. Un thriller violent marqué par de nombreuses bavures policières mais aussi ponctué de quelques touches d’humour qui permettent de relativiser ce contexte politique noir. Un contexte politique qui n’est pas sans rappeler la montée du parti de droite indépendantiste (NVA) lors des dernières élections fédérales belges, en 2014. Une similarité accentuée par la présence de multiples drapeaux arborant le fameux lion noir sur fond jaune, symbole de la Flandre.
Malgré la dureté de certaines scènes et le caractère très réaliste de l’ascension politique d’un personnage aux discours radicaux, le spectateur se sent happé dans une enquête policière digne d’un cauchemar sans fin dont il attend patiemment la résolution. Avec Dode Hoek, Nabil Ben Yadir signe à nouveau un film marquant avec en toile de fond un discours politique actuel qui reflète la montée du populisme dans le monde.
Catherine Ducat