Le 26 octobre dernier, un peu de douceur et de soleil inondaient l’Ancienne Belgique sous sa forme AB Box. Une forme fort peu pratique, il faut le dire, lorsque – comme lors d’une telle date – la salle est remplie. On se retrouve du coup cloisonné au fond, sans réelle possibilité de se frayer un chemin ou d’obtenir un brin d’espace durant le live.
Mais trêve de considérations logistiques. La soirée démarre en trombe avec le trio guitare-guitare-batterie belge, Double Veterans (DV). Les jeunots originaires de – sans totale certitude, Anvers, mais pour rester vague disons – Flandre s’affirme depuis maintenant quelque quatre années comme une étoile montante de la scène rock belge. Après un premier album, The Brotherhood Of Scary Hair and Homemade Religion, contenant quelques tubes en puissance, DV est de plus en plus présent. Depuis la sortie de son second LP, Space Age Voyeurism, qui s’est fêtée dans un Het Bos plein à craquer, le groupe nous gratifie d’un son garage/lo-fi/psyché complètement rôdé. Découvert en première partie de Fuzz au Muziekodroom, DV avait marqué par un son direct, efficace et percutant. Mission accomplie, ici aussi, en première partie d’Allah-Las, où on ne peut que saluer la prestation sans accros, mais non sans impros, de cette formation rockandrollesque. Le titre Beach Life a fait son effet, comme à son habitude. Notons également le petit moment de consécration avec le titre Messenger Dead Message Alive. Dieu que le son était bon, dieu qu’ils étaient bons ! Entendu ce soir-là : « c’est le meilleur groupe anglais belge ! ».
Après cette vague d’énergie brute, la salle se prépare à une toute autre ambiance. En effet, si les Allah-Las, tout droit venus de Los Angeles, comptent parmi leurs nombreuses étiquettes celle du garage, il s’agit dans ce cas de la face soft du genre. Dans un revival 60’s agrémenté de surf music, la bande à Miles Michaud nous fait l’effet d’un Prozac en bord de plage. Active depuis 2008, elle nous gratifie d’un excellentissime premier album éponyme en 2012. Devenu bande son du quotidien, autant à la maison qu’au boulot par son côté agréable à l’écoute en toutes circonstances, le groupe réitère l’exploit deux ans plus tard avec son œuvre léchée : Worship The Sun. Sans transcender le premier, il en est la parfaite continuité. Et c’est dans le même ordre d’idées que Calexico Review, qu’il vient défendre ce soir sur la scène de l’AB, sera également perçu. Le groupe ne se réinvente pas mais, avec un tel style de musique, on pourrait même considérer qu’il n’invente pas grand chose, tant il paraît anachronique. Le live est à l’image de ses albums : carré, pointilleux, pointu et réglé sur du papier à musique. Ses compos sont précises et chaque son coule délicieusement dans une douce réverbération. Les musiciens endossent efficacement le rôle de chanteur, ce qui donne un certain relief à une prestation qui pourrait sembler en manquer. Les sourires se collent sur les visages et les corps se balancent, la magie opère. Le son est aussi clair et net que pour la première partie et c’est avec une certaine délectation que l’on se vautre dans un état semi-léthargique. Dieu que c’était bon, dieu qu’ils étaient bons ! Pensé ce soir-là : « Pourquoi donc ne pas être né(e) cinquante ans plus tôt ? ».